Mandat de protection en prévision d’inaptitude – Les articles pertinents du Code civil du Québec
SECTION I
2130. Le mandat est le contrat par lequel une personne, le mandant, donne le pouvoir de la représenter dans l’accomplissement d’un acte juridique avec un tiers, à une autre personne, le mandataire qui, par le fait de son acceptation, s’oblige à l’exercer.
1991, c. 64, a. 2130.
2131. Le mandat peut aussi avoir pour objet les actes destinés à assurer, en prévision de l’inaptitude du mandant à prendre soin de lui-même ou à administrer ses biens, la protection de sa personne, l’administration, en tout ou en partie, de son patrimoine et, en général, son bien-être moral et matériel.
1991, c. 64, a. 2131.
2132. L’acceptation du mandat est expresse ou tacite; elle est tacite lorsqu’elle s’induit des actes et même du silence du mandataire.
1991, c. 64, a. 2132.
2133. Le mandat est à titre gratuit ou à titre onéreux. Le mandat conclu entre deux personnes physiques est présumé à titre gratuit, mais le mandat professionnel est présumé à titre onéreux.
1991, c. 64, a. 2133.
2134. La rémunération, s’il y a lieu, est déterminée par le contrat, les usages ou la loi, ou encore d’après la valeur des services rendus.
1991, c. 64, a. 2134.
2135. Le mandat peut être soit spécial pour une affaire particulière, soit général pour toutes les affaires du mandant.
1991, c. 64, a. 2135; N.I. 2016-01-01 (NCPC).
2136. Les pouvoirs du mandataire s’étendent non seulement à ce qui est exprimé dans le mandat, mais encore à tout ce qui peut s’en déduire. Le mandataire peut faire tous les actes qui découlent de ces pouvoirs et qui sont nécessaires à l’exécution du mandat.
1991, c. 64, a. 2136.
2137. Les pouvoirs que l’on donne à des personnes de faire un acte qui n’est pas étranger à la profession ou aux fonctions qu’elles exercent, mais se déduisent de leur nature, n’ont pas besoin d’être mentionnés expressément.
1991, c. 64, a. 2137.
SECTION II
2138. Le mandataire est tenu d’accomplir le mandat qu’il a accepté et il doit, dans l’exécution de son mandat, agir avec prudence et diligence.
1991, c. 64, a. 2138.
2139. Au cours du mandat, le mandataire est tenu, à la demande du mandant ou lorsque les circonstances le justifient, de l’informer de l’état d’exécution du mandat.
1991, c. 64, a. 2139.
2140. Le mandataire est tenu d’accomplir personnellement le mandat, à moins que le mandant ne l’ait autorisé à se substituer une autre personne pour exécuter tout ou partie du mandat.
1991, c. 64, a. 2140.
2141. Le mandataire répond, comme s’il les avait personnellement accomplis, des actes de la personne qu’il s’est substituée, lorsqu’il n’était pas autorisé à le faire; s’il était autorisé à se substituer quelqu’un, il ne répond que du soin avec lequel il a choisi son substitut et lui a donné ses instructions.
1991, c. 64, a. 2141.
2142. Le mandataire peut, dans l’exécution du mandat, se faire assister par une autre personne et lui déléguer des pouvoirs à cette fin, à moins que le mandant ou l’usage ne l’interdise.
1991, c. 64, a. 2142.
2143. Un mandataire qui accepte de représenter, pour un même acte, des parties dont les intérêts sont en conflit ou susceptibles de l’être, doit en informer chacun des mandants, à moins que l’usage ou leur connaissance respective du double mandat ne l’en dispense, et il doit agir envers chacun d’eux avec impartialité.
1991, c. 64, a. 2143.
2144. Lorsque plusieurs mandataires sont nommés ensemble pour la même affaire, le mandat n’a d’effet que s’il est accepté par tous.
1991, c. 64, a. 2144.
2145. Le mandataire qui exerce seul des pouvoirs qu’il est chargé d’exercer avec un autre excède ses pouvoirs, à moins qu’il ne les ait exercés d’une manière plus avantageuse pour le mandant que celle qui était convenue.
1991, c. 64, a. 2145.
2146. Le mandataire ne peut utiliser à son profit l’information qu’il obtient ou le bien qu’il est chargé de recevoir ou d’administrer dans l’exécution de son mandat, à moins que le mandant n’y ait consenti ou que l’utilisation ne résulte de la loi ou du mandat.
1991, c. 64, a. 2146.
2147. Le mandataire ne peut se porter partie, même par personne interposée, à un acte qu’il a accepté de conclure pour son mandant, à moins que celui-ci ne l’autorise, ou ne connaisse sa qualité de cocontractant.
1991, c. 64, a. 2147.
2148. Si le mandat est gratuit, le tribunal peut, lorsqu’il apprécie l’étendue de la responsabilité du mandataire, réduire le montant des dommages-intérêts dont il est tenu.
1991, c. 64, a. 2148.
2149. Le mandant est tenu de coopérer avec le mandataire de manière à favoriser l’accomplissement du mandat.
1991, c. 64, a. 2149.
2150. Le mandant, s’il en est requis, avance au mandataire les sommes nécessaires à l’exécution du mandat. Il rembourse au mandataire les frais raisonnables que celui-ci a engagés et lui verse la rémunération à laquelle il a droit.
1991, c. 64, a. 2150.
2151. Le mandant doit l’intérêt sur les frais engagés par le mandataire dans l’exécution de son mandat, à compter du jour où ils ont été déboursés.
1991, c. 64, a. 2151.
2152. Le mandant est tenu de décharger le mandataire des obligations que celui-ci a contractées envers les tiers dans les limites du mandat.
1991, c. 64, a. 2152.
2153. Le mandant est présumé avoir ratifié l’acte qui excède les limites du mandat, lorsque cet acte a été accompli d’une manière qui lui est plus avantageuse que celle même qu’il avait indiquée.
1991, c. 64, a. 2153.
2154. Le mandant est tenu d’indemniser le mandataire qui n’a commis aucune faute, du préjudice que ce dernier a subi en raison de l’exécution du mandat.
1991, c. 64, a. 2154.
2155. Si aucune faute n’est imputable au mandataire, les sommes qui lui sont dues le sont lors même que l’affaire n’aurait pas réussi.
1991, c. 64, a. 2155.
2156. Si le mandat a été donné par plusieurs personnes, leur obligation à l’égard du mandataire est solidaire.
1991, c. 64, a. 2156.
SECTION III
2157. Le mandataire qui, dans les limites de son mandat, s’oblige au nom et pour le compte du mandant, n’est pas personnellement tenu envers le tiers avec qui il contracte.
1991, c. 64, a. 2157.
2158. Le mandataire qui outrepasse ses pouvoirs est personnellement tenu envers le tiers avec qui il contracte, à moins que le tiers n’ait eu une connaissance suffisante du mandat, ou que le mandant n’ait ratifié les actes que le mandataire a accomplis.
1991, c. 64, a. 2158.
2159. Le mandataire s’engage personnellement, s’il convient avec le tiers que, dans un délai fixé, il révélera l’identité de son mandant et qu’il omet de le faire.
1991, c. 64, a. 2159.
2160. Le mandant est tenu envers le tiers des actes accomplis par le mandataire dans l’exécution et les limites du mandat, sauf si, par la convention ou les usages, le mandataire est seul tenu.
1991, c. 64, a. 2160; N.I. 2015-11-01.
2161. Le mandant peut, s’il en subit un préjudice, répudier les actes de la personne que le mandataire s’est substituée lorsque cette substitution s’est faite sans l’autorisation du mandant ou sans que son intérêt ou les circonstances justifient la substitution.
1991, c. 64, a. 2161.
2162. Le mandant ou, à son décès, ses héritiers sont tenus envers le tiers des actes accomplis par le mandataire dans l’exécution et les limites du mandat après la fin de celui-ci, lorsque ces actes étaient la suite nécessaire de ceux déjà accomplis ou qu’ils ne pouvaient être différés sans risque de perte, ou encore lorsque la fin du mandat est restée inconnue du tiers.
1991, c. 64, a. 2162; N.I. 2015-11-01.
2163. Celui qui a laissé croire qu’une personne était son mandataire est tenu, comme s’il y avait eu mandat, envers le tiers qui a contracté de bonne foi avec celle-ci, à moins qu’il n’ait pris des mesures appropriées pour prévenir l’erreur dans des circonstances qui la rendaient prévisible.
1991, c. 64, a. 2163.
2164. Le mandant répond du préjudice causé par la faute du mandataire dans l’exécution de son mandat, à moins qu’il ne prouve, lorsque le mandataire n’était pas son préposé, qu’il n’aurait pas pu empêcher le dommage.
1991, c. 64, a. 2164.
2165. Le mandant peut, après avoir révélé au tiers le mandat qu’il avait consenti, poursuivre directement le tiers pour l’exécution des obligations contractées par ce dernier à l’égard du mandataire qui avait agi en son propre nom; toutefois, le tiers peut lui opposer l’incompatibilité du mandat avec les stipulations ou la nature de son contrat et les moyens respectivement opposables au mandant et au mandataire.
1991, c. 64, a. 2165.
SECTION IV
2014, c. 1, a. 794.
2166. Le mandat de protection est celui donné par une personne majeure en prévision de son inaptitude à prendre soin d’elle-même ou à administrer ses biens; il est fait par acte notarié en minute ou devant témoins.
1991, c. 64, a. 2166; 2014, c. 1, a. 795.
2167. Le mandat devant témoins est rédigé par le mandant ou par un tiers.
1991, c. 64, a. 2167.
2167.1. Le tribunal peut, au cours de l’instance d’homologation du mandat ou même avant si une demande d’homologation est imminente et qu’il y a lieu d’agir pour éviter au mandant un préjudice sérieux, rendre toute ordonnance qu’il estime nécessaire pour assurer la protection de la personne du mandant, sa représentation dans l’exercice de ses droits civils ou l’administration de ses biens.
2002, c. 19, a. 9.
2168. Lorsque la portée du mandat est douteuse, le mandataire l’interprète selon les règles relatives à la tutelle au majeur.
1991, c. 64, a. 2168.
2169. Lorsque le mandat ne permet pas d’assurer pleinement les soins de la personne ou l’administration de ses biens, un régime de protection peut être établi pour le compléter; le mandataire poursuit alors l’exécution de son mandat et fait rapport, sur demande et au moins une fois l’an, au tuteur ou au curateur et, à la fin du mandat, il leur rend compte.
1991, c. 64, a. 2169; N.I. 2015-11-01.
2170. Les actes faits antérieurement à l’homologation du mandat peuvent être annulés ou les obligations qui en découlent réduites, sur la seule preuve que l’inaptitude était notoire ou connue du cocontractant à l’époque où les actes ont été passés.
1991, c. 64, a. 2170.
2171. Sauf stipulation contraire dans le mandat, le mandataire est autorisé à exécuter à son profit les obligations du mandant prévues aux articles 2150 à 2152 et 2154.
1991, c. 64, a. 2171.
2172. Le mandat cesse d’avoir effet lorsque le tribunal constate que le mandant est redevenu apte; ce dernier peut alors, s’il le considère approprié, révoquer son mandat.
1991, c. 64, a. 2172.
2173. S’il constate que le mandant est redevenu apte, le directeur général de l’établissement de santé ou de services sociaux qui prodigue des soins ou procure des services au mandant doit attester cette aptitude dans un rapport qu’il dépose au greffe du tribunal. Ce rapport est constitué, entre autres, de l’évaluation médicale et psychosociale.
1991, c. 64, a. 2173.
2174. Le mandataire ne peut, malgré toute stipulation contraire, renoncer à son mandat sans avoir au préalable pourvu à son remplacement si le mandat y pourvoit, ou sans avoir demandé l’ouverture d’un régime de protection à l’égard du mandant.
1991, c. 64, a. 2174.
SECTION V
2175. Outre les causes d’extinction communes aux obligations, le mandat prend fin par la révocation qu’en fait le mandant, par la renonciation du mandataire ou par l’extinction du pouvoir qui lui a été donné, ou encore par le décès de l’une ou l’autre des parties.
1991, c. 64, a. 2175; N.I. 2016-01-01 (NCPC).
2176. Le mandant peut révoquer le mandat et contraindre le mandataire à lui remettre la procuration, pour qu’il y fasse mention de la fin du mandat. Le mandataire a le droit d’exiger du mandant qu’il lui fournisse un double de la procuration portant cette mention.
1991, c. 64, a. 2176.
2177. Lorsque le mandant est inapte, toute personne intéressée, y compris le curateur public, peut, si le mandat n’est pas fidèlement exécuté ou pour un autre motif sérieux, demander au tribunal de révoquer le mandat, d’ordonner la reddition de compte du mandataire et d’ouvrir un régime de protection à l’égard du mandant.
1991, c. 64, a. 2177.
2178. Le mandataire peut renoncer au mandat qu’il a accepté, en notifiant sa renonciation au mandant. Il a alors droit, si le mandat était donné à titre onéreux, à la rémunération qu’il a gagnée jusqu’au jour de sa renonciation.
1991, c. 64, a. 2178.
2179. Le mandant peut, pour une durée déterminée ou pour assurer l’exécution d’une obligation particulière, renoncer à son droit de révoquer unilatéralement le mandat.
1991, c. 64, a. 2179; 2002, c. 19, a. 10.
2180. La constitution par le mandant d’un nouveau mandataire, pour la même affaire, vaut révocation du premier mandataire, à compter du jour où elle lui a été notifiée.
1991, c. 64, a. 2180.
2181. Le mandant qui révoque le mandat demeure tenu d’exécuter ses obligations envers le mandataire; il est aussi tenu de réparer le préjudice causé au mandataire par la révocation faite sans motif sérieux et à contretemps.
1991, c. 64, a. 2181.
2182. Lorsque le mandat prend fin, le mandataire est tenu de faire ce qui est la suite nécessaire de ses actes ou ce qui ne peut être différé sans risque de perte.
1991, c. 64, a. 2182.
2183. En cas de décès du mandataire ou en cas d’ouverture à son égard d’un régime de protection, le liquidateur, tuteur ou curateur qui connaît le mandat et qui n’est pas dans l’impossibilité d’agir est tenu d’en aviser le mandant et de faire, dans les affaires commencées, tout ce qui ne peut être différé sans risque de perte.
1991, c. 64, a. 2183; N.I. 2016-01-01 (NCPC).
2184. À la fin du mandat, le mandataire est tenu de rendre compte et de remettre au mandant tout ce qu’il a reçu dans l’exécution de ses fonctions, même si ce qu’il a reçu n’était pas dû au mandant.
1991, c. 64, a. 2184.
2185. Le mandataire a le droit de déduire, des sommes qu’il doit remettre, ce que le mandant lui doit en raison du mandat.
1991, c. 64, a. 2185.
Me Leopold Lincà, notaire
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